LA COMMANDE PROPORTIONNELLE : QUELQUES REMARQUES
Après
des années en faveur de l'orgue à transmission
mécanique, la mode en France se porte actuellement sur la
commande proportionnelle.
C'est
à dire la possibilité de commander la position des soupapes des
sommiers en proportion de l'enfoncement des notes des claviers.
Ceci de façon électronique
à distance. Ce qui peut intéresser certains puristes dans le cas
d'orgues où pour des raisons de place et de distance entre la console
et les sommiers est importante, une transmission mécanique classique
est impossible.
Ceci
constitue le rêve de nombreuses générations d'organistes de
pouvoir disposer d'un toucher pianistique mais qui repose à mon sens
sur un malentendu scientifique.
En
effet, la maîtrise de la puissance sonore de la corde vibrante est par
essence totalement différente dans le cas du tuyau sonore :
- La
corde conserve une fréquence inchangée quelle que soit la vitesse de
frappe du marteau. Sa fréquence ne dépend que de sa longueur et de sa
masse volumique.
- Au
contraire, si le débit d'air à l'entrée d'un tuyau varie, la hauteur de
la fréquence du tuyau change. On peut en faire facilement l'expérience
en soufflant plus ou moins fort dans un tuyau. Celui-ci devient
désaccordé, produisant bien entendu un effet assez désagréable. A
rapprocher du pianoforte, première tentative d'expression qui s'acheva
sous sa forme définitive avec le piano.
- Enfin, il
faut rappeler que le piano est un instrument mono-timbral, au contraire
de l'orgue. C'est en quelque sorte un orgue de 1 jeu. Donc toute
variation de la vitesse de frappe change profondément la pussance
sonore.
- Pour avoir un effet identique avec l'orgue,
il faudrait réduire considérablement le débit, pour obtenir une
véritable dynamique identique à celle du piano. Ce qui ne manquerait
pas d'engendrer une cacophonie sonore considérable, le tuyau changeant
alors sa fréquence, au contraire, rappelons-le, de la corde vibrante.
Ce
préalable étant exposé, explorons les solutions -ou plûtôt - LA
solution technique proposée par la société ELTEC, étant donné qu'aucun
autre constructeur ne s'est lancé dans cette voie.
Cette
société propose donc un système proportionnel basé sur 2
électro-aimants de force différente en parallèle par soupape. Ce
matériel est d'une qualité indéniable, car il s'appuie sur les
compétences d'une société d'électronique, mais en plus des remarques
ci-dessus sur le principe, il faut souligner :
- Que
cette "proportionnalité" ne l'est pas vraiment, puisque la logique
binaire montre que les 4 états possibles des 2 électros sont : 0 1/4
1/2 3/4 1
- Un vrai système proportionnel devrait suivre de façon analogique continue la position de la note. Ce qui augmenterait encore le coût du système.
- Enfin, ce système est bien entendu beaucoup plus couteux que les électro-soupapes standards.
- Il ne peut en conséqunce être utilisé pour les sommiers unité (avec un électro par tuyau) qu'au prix d'un surcoût important.
- Enfin,
il y a d'autres voies à explorer : Par exemple, "chopper" (c'est à dire
faire un découpage à modulation de fréquence) de la tension d'entrée
des électros, par logiciel avec un PC pas nécessairement haut de gamme.
- Faire
ainsi que je l'ai réalisé une commande expressive sensitive des
soupapes, c'est à dire, commander dynamiquement la registration en
fonction de la vélocité d'enfoncement des touches. Le seul véritable moyen pour l'orgue de concilier la maîtrise de la puissance sonore sans altérer la fréquence des tuyaux.
- Des concertistes internationaux comme Paolo Oreni et le Facteur d'Orgues Saverio Tamburini s'intéressent de près à ce système.
- Notons enfin que les grands virtuoses recherchent surtout une
grande douceur des claviers, associée à un zeste de sensation de
décollement, permettant une grande virtuosité dans les parties
complexes du répertoire.
- Enfin,
il est possible de prévoir par programamtion des courbes enveloppe de
chaque note, permettant au clavieriste (pianiste ou organiste) d'avoir
une croissance, puis une décroissance du son comme sur un piano.Ceci de façon complètement ajustable.
- Le
but à terme grâce à ce système, serait que l'on ne se pose plus la
question de savoir si une oeuvre peut ou non être jouée à l'orgue. En étendant bien entendu les claviers à 7 octaves.
Rappelons
pour mémoire les tentatives de maîtrise mécanique du toucher, soupapes
à doubles détente, très basses pressions à 4cm, etc... qui n'ont jamais
convaincu grand monde.
Certaines
étaient faites dans le but louable
de réduire la résistance des touches des claviers. Dans ce cadre,
citons le facteur d'orgue Jean-François Dupont à St Pierre de Caen avec des
soupapes mécaniques à
double détente. Citons aussi le ramarqueble orgue de la cathédrale
d'Auxerre en Bourgogne, avec ses transmissions en fibre de carbone.
Comme à Caen, Jean-François Dupont a réalisé un très bel orgue au
toucher très agréable.
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